Alors que l’annonce récente du retour à la compétition de Richie Rude réveille nos mémoires concernant le dopage dans l’Enduro, une nouvelle affaire de dopage tombe sur la table ! Cette fois, c’est Martin Maes, actuel leader des EWS qui en est le sujet !
Pourquoi est-il condamné ? Quelle est la sanction ? Qui est en charge de l’affaire ? Et quelles pourraient être les conséquences au classement des EWS 2019 ? Endurotribe décortique le dossier…
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D’où ça commence !?
Tout juste 2 semaines avant la première manche des Enduro World Series 2019 en Nouvelle-Zélande, Martin Maes s’alignait au départ de la NZ Enduro, où nous étions. Il est contraint a abandonné dès le premier jour suite à une blessure – une belle entaille – au tibia qui risque de s’infecter ! Il préfère jouer la prudence et se soigner avant la course importante !
Voici comment tout commence ! C’est ainsi que le docteur lui prescrit un antibiotique. Mais l’infection grandissante, 2 jours plus tard, l’oblige à doubler la dose pour assurer la guérison et éviter l’infection généralisée et l’hospitalisation. Il doit donc lui prescrire un médicament pour l’aider à mieux assimiler la surdose – en augmentant le taux sanguin d’antibiotique en évitant l’excrétion rénale. Un geste pleinement assumé par le médecin !
Le Belge est donc, ensuite, contrôlé positif au Probénécide – contenu dans le médicament – lors des deux premières manches EWS 2019. Cette substance est connue pour avoir été utilisée comme masquant dans d’autres affaires de dopage…
Les conséquences…
Martin ne nie absolument pas les faits. Il déclare même avoir demandé à l’UCI l’autorisation pour un usage thérapeutique ! Comme il a déjà été contrôlé négatif par le passé, à 13 reprises, qu’il l’a encore été à Madère, et que la demande d’autorisation a été refusée, il écope juste de la peine minimale : 90 jours de suspension à partir du 13 mai 2019, le lendemain de l’étape portugaise, pour violation involontaire des règles de l’anti-dopage. En guise de rappel à l’ordre…
Une affaire qui soulève d’autres interrogations, que Martin soulève lui-même par ses paroles…
Même si l’Enduro se professionnalise, nous – les pilotes – sommes encore trop amateurs et naïfs !
Une affaire qui contraste aussi fortement avec celle de Rude/Graves ! Cette dernière, qui relève de l’AFLD, reste très opaque et traine en longueur, quand celle de Martin, gérée par l’UCI, officialise un verdict clair qui tombe en à peine trois mois !
Martin perd donc ses victoires d’étape en Nouvelle-Zélande et en Tasmanie mais conserve celle de Madère et ne pourra pas retrouver le chemin des Enduro World Series avant le jour de la course à Whistler, le 11 août !
La suite !?
A l’aube de la quatrième manche en Italie, cette triste nouvelle remet toute la saison en question alors que le Belge dominait les hostilités et pouvait enfin largement prétendre au titre ! Les cartes sont rebattues… Martin Maes songe déjà a retenter sa chance aux championnats du monde de DH en septembre !
Dans une telle configuration, d’après nos calculs, c’est le frenchy Florian Nicolai qui prendrait les rennes avec 1320 points devant le duo canadien de chez Rocky Mountain : second, Jesse Melamed aurait 1210 points et Rémi Gauvin serait troisième avec 1120 points ! Martin, avec ses 540 points, serait relégué vers la 30e position…
Un remue ménage dont nous nous serions bien passé, d’ailleurs Martin aussi, mais les règles sont les règles ! Cependant, récemment, nous appelions, en commentaire, à la prise en compte nécessaire des pilotes et leurs staffs via des formations et des suivis en matière de dopage. Cet événement en est la triste démonstration…
Complément d’information du 27/06/19, 8h30
Règlement UCI / Autorisation d’Usage Thérapeutique
> Qu’aurait-dû faire Martin ?!
Il est évident que l’étonnement et la déception prédominent parmi les réactions que suscitent la nouvelle traitée par cet article. Une certaine forme d’incompréhension également, notamment des règles précises qui sont en vigueur pour pareil cas de figure. Qu’aurait dû faire Martin Maes ?!
Malgré toute la bonne volonté affichée, l’UCI a statué un manquement de sa part, au regard des règles dont elle se veut garante. Dans notre mission d’information, nous avons donc consulté ces règles, regroupées au sein du Règlement UCI pour les Autorisations d’Usage à des fins Thérapeutiques, et en partageons ici notre lecture, afin de participer au nécessaire acte de formation du milieu.
[toggler title= »Conditions principales » ]
C’est notamment la section 4.0 de ce règlement qui livre des précisions. Elle indique que pour obtenir une telle AUT, la demande doit respecter TOUTES les conditions suivantes :
– La substance ou la méthode interdite en question est nécessaire au traitement d’une pathologie aiguë ou chronique telle que le Coureur subirait un préjudice de santé significatif si la substance ou la méthode interdite n’était pas administrée.
– Il est hautement improbable que l’usage thérapeutique de la substance ou de la méthode interdite produise une amélioration de la performance au-delà de celle attribuable au retour à l’état de santé normal du sportif après le traitement de la pathologie aiguë ou chronique.
– Il ne doit pas exister d’alternative thérapeutique autorisée pouvant se substituer à la substance ou à la méthode interdite.
– La nécessité d’utiliser la substance ou méthode interdite n’est pas une conséquence partielle ou totale de l’utilisation antérieure (sans AUT) d’une substance ou méthode qui était interdite au moment de son usage.
Ici, c’est principalement l’existence d’alternatives thérapeutiques autorisées qui peut faire débat. L’intervention chirurgicale en fait-elle parti ? Un sportif n’a-t-il pas droit de se soigner au plus efficacement sans compromettre son activité, et doit-il prendre un risque important de complication dans pareil cas de figure ?!
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[toggler title= »Statut et rétroactivité » ]
D’une manière générale, en matière d’AUT, l’UCI distingue les statuts des pilotes internationaux/nationaux des autres pilotes. Ainsi, les droits de ces premiers en matière de rétroactivité sont restreints, alors qu’un amateur a droit à plus de flexibilité.
En clair, un coureur international/national doit absolument demander une AUT dès que possible, et avant la mise en oeuvre du traitement. L’UCI s’engage à la traiter au plus vite, et dans un délai maximal de 21 jours. Seuls les quatre cas de figure suivants peuvent permettre l’obtention d’une AUT de manière rétro-active :
– En cas d’urgence médicale ou de traitement d’une pathologie aiguë ; ou si, en raison d’autres circonstances exceptionnelles, il n’y a pas eu suffisamment de temps ou de possibilités pour que le Coureur soumette une demande d’AUT avant le prélèvement de l’échantillon ou pour que le CAUT l’étudie ; ou
– Si les règles applicables exigeaient que le Coureur (voir le commentaire sur l’article 5.1) ou permettaient que le Coureur (voir l’article 4.4.5 du Code) soumette une demande d’AUT rétroactive ; ou il est convenu par l’UCI qu’une AUT rétroactive doit être accordée au nom de l’équité.
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[toggler title= »Dans le cas présent » ]
Dans le cas présent, Martin Maes, de par ses divers résultats et participations, est considéré comme un coureur de niveau international. Il doit donc se soumettre aux règles en vigueur à propos de ce statut. Notamment – c’est la réalité de notre époque, et c’est malheureux à lire – la restriction des droits qui incombent à un sportif de ce statut.
Martin aurait donc d’abord dû, dans l’ordre :
1. vérifier la présence ou non des produits prescrits aux listes des substances interdites
2. demander l’existence d’une alternative autorisée et décider en son âme et conscience
3. déposer la demande d’AUT au plus tôt, et non une fois le contrôle avéré
Ici, deux instants précis sont à considérer. Le premier, au moment d’accepter le traitement. Une connaissance précise du règlement en vigueur aurait au moins dû l’amener à s’interroger sur : le traitement à suivre, et le risque encouru à prendre le départ des compétitions suivantes.
Ensuite, quant à la démarche de demande d’AUT. Il est malheureusement évident qu’en attendant la notification des contrôles positifs pour effectuer les démarches, le sort était scellé et la sanction, inévitable, compte tenu des règlements construits pour verrouiller au maximum les possibilités de contournement dont tout le monde s’offusquerait par ailleurs.
Saluons pour l’heure la qualité et la clarté des informations transmises par Martin pour expliquer le cas de figure et permettre de compléter/informer. Passée l’erreur qu’il reconnait et pour laquelle il assume pleinement la sanction : gageons que cette attitude et sa présence sur l’EWS à venir pour assumer sa position, démontre le potentiel intact dont il fait une fois de plus preuve en vue d’être un leader incontesté/able de la discipline.
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