EWS de Madère – Le Journal de Justin Leov

Une petite semaine après l’Enduro World Series de Madère, Justin Leov (Canyon Factory Enduro Team) nous fait partager sa course et impressions sur l’étape portugaise…

 


Temps de lecture estimé : 5 minutes – Texte : Justin Leov – Photos : Sebastian Schieck


 

 

Retour en forme à Madère

Après la Tasmanie, j’étais retourné en Nouvelle-Zélande où mon médecin m’avait diagnostiqué une pneumonie et conseillé le repos total pendant plusieurs semaines. J’arrivais donc à Madère sans le niveau d’entraînement que j’aurais souhaité mais content en tout cas de pouvoir reprendre le chemin de la compétition.

Nous sommes arrivés suffisamment tôt à Madère pour pouvoir reconnaître à pied la plupart des spéciales. C’était incroyable de découvrir la grande variété de climats et de terrains que ce territoire peut offrir. L’atmosphère sur cette petite île portugaise est vraiment délicieuse et je m’y suis tout de suite bien senti.

Compte tenu du terrain très rocailleux dans la plupart des spéciales chronométrées, je décidais d’opter pour la version du Strive à grand débattement. Je prévoyais aussi d’utiliser le « Flat Tire Defender (FTD) » de façon à pouvoir, en cas de crevaison, continuer à rouler sans endommager mes jantes.

Les conditions météo à Madère suivaient un schéma bien précis. Temps sec et ensoleillé en ville et au pied de la montagne, nuageux, venteux, et même pluvieux au sommet. Dès les premiers entraînements il fut évident qu’il fallait, avant de quitter notre logement, se munir au minimum d’un bon coupe-vent imperméable et prévoir aussi des lunettes ou un masque antibuée.

Je me sentais en pleine forme après les reconnaissances et les entraînements, j’avais maintenant hâte que le week-end arrive.

La première des deux journées de compétition devait être la plus physique, et la première spéciale, la plus difficile de toutes. Je ne peux que confirmer ces prévisions ! Ce fut un démarrage éprouvant, j’étais complètement vidé à l’arrivée de mon run mais content d’avoir passé ce premier gros test sans encombres. Il me fallut pratiquement toute la liaison suivante pour récupérer avant de m’élancer dans la seconde spéciale chronométrée. Avec ses nombreux passages sur racines mouillées et singles étroits sur rochers glissants elle ne promettait rien de bon elle non plus ! Je m’en sortais plutôt bien en réussissant à maintenir un pilotage « propre » et j’étais satisfait de mon début de journée.

La troisième spéciale était la plus dangereuse du week-end. Très peu de marge de manœuvre en dehors de la trajectoire idéale et en prime, des rochers prêts à lacérer les pneus les plus résistants à la moindre erreur. J’étais super heureux, sur une spéciale aussi piégeuse, de réussir un run encore très propre avec un top ten à la clé.

Une montée éprouvante nous attendait jusqu’au ravitaillement. J’avais terminé mes réserves d’eau et je commençais vraiment à sentir le poids des efforts du jour. Il restait une dernière spéciale à courir, et je parvenais à terminer non sans me faire quelques frayeurs mais sans énorme faute. Un bilan de la première journée donc plutôt positif et une treizième place au classement provisoire.

J’étais content d’aborder la deuxième journée dans cette position. Le parcours promettait d’être très technique. Dès la spéciale 5 je sentais la fatigue de la veille et il me fallut pousser au-delà de la douleur de mes muscles. Le chrono était satisfaisant mais j’appréhendais un peu ce qui allait suivre. La liaison suivante fut pénible et je savais que je n’avais pas récupéré suffisamment. Je décidais d’être plutôt prudent dans la spéciale 6.

La spéciale 7 était typée très DH. À l’entrée du premier rock garden, j’étais déterminé à ne pas toucher les freins et à l’aborder à pleine vitesse. J’allais beaucoup plus vite que lors des entraînements de reconnaissance. Le problème c’est que je n’avais pas le bon tempo et très vite je me retrouvais complètement hors trajectoire, filant droit dans un photographe posté sur le bord du parcours. Je me souviendrais longtemps de ses yeux alors qu’il me regardait, pétrifié, lui foncer dessus à toute allure ! Cela aurait été vraiment dramatique de blesser quelqu’un venu simplement assister à la course, heureusement, plus de peur que de mal, aussi bien pour lui que pour moi et je parvenais à reprendre la course sans perdre trop de temps.

Une liaison nous séparaient du ravitaillement et j’étais bien content de refaire le plein d‘énergie. Je sentais que je n’avais plus toute ma lucidité, je devais absolument me concentrer pour éviter une erreur fatale en fin de course.

La spéciale 8 était beaucoup plus longue et je la négociais sans trop de difficultés jusque vers la fin où un problème de dérailleur m’empêcha de pédaler. Je parcourais les derniers hectomètres en roue libre en poussant de temps en temps avec les pieds.

Heureusement j’arrivais à résoudre rapidement le problème après avoir franchi la ligne d’arrivée. Il restait une dernière spéciale à courir et je voulais terminer fort. J’étais alors quatorzième au classement général provisoire et je savais que pour maintenir au moins cette position il me fallait finir par une bonne performance malgré la fatigue grandissante. Pour la première fois depuis des années, je prenais une boisson énergétique, elles étaient disponibles dans l’aire de départ. Normalement ce genre de boisson m’énerve plus qu’elle ne me stimule mais là, j’étais tellement à cours de carburant que je décidais de prendre le risque. Cette fois ça fonctionna plutôt bien et je réalisais mon meilleur résultat du week-end sur cette dernière spéciale avec, à la clé, une quatorzième place au classement général.

Ce n’est pas un podium, ni même un top ten, mais en tout cas un résultat qui me replace dans la bonne direction après toutes les difficultés rencontrées lors des deux premières étapes des Enduro World Series 2017.

Prochain rendez-vous, l’Irlande. L’occasion de faire encore mieux !

Justin Leov