L’intuition a parfois du bon. On la connait tous. Cette petite idée derrière la tête. Celle qui nous pousse à commencer certaines phrases par un « quelque chose me dit… » Par essence, elle se manifeste lorsqu’une opportunité s’offre à nous. Autant dire qu’elle est inévitable au moment de décider du prochain vélo.
C’était même l’objet de la présentation de ce Yeti SB5.5C, dans les tuyaux Endurotribe. Plusieurs éléments de montage, de géométrie, et d’ajustements suggérant un certain potentiel.
Encore faut-il qu’elle se vérifie sur le terrain. Mieux, que l’ensemble des éléments récoltés s’avère constructif et cohérent. La tâche n’est pas toujours évidente. Mais n’est-ce pas là tout l’objet de cet essai ?! Oui, le Yeti SB5.5C est en passe d’être le meilleur vélo essayé jusque-là… Mais ce n’est pas tout de le dire…
Yeti SB5.5C X01
[cbtabs][cbtab title= »Prix »]8399 euros PGC[/cbtab][cbtab title= »Poids »]12,6 kg (vérifié, taille L, sans pédales, pneu Michelin advanced sans préventif)[/cbtab][cbtab title= »Fiche produit »]http://www.yeticycles.com/bikes/sb55c[/cbtab][/cbtabs]
En matière de récolte d’infos, l’essai du Yeti SB5.5C n’est pas en reste. Avec la Megavalanche de l’Alpe d’Huez et les recos de l’EWS de La Thuile en point d’orgue, autant dire que les opportunités de cogiter ne manquent pas.
Pourtant, c’est en amont que l’enquête commence. Par un premier constat sans appel ! La Megavalanche est une course… Longue ! Autant m’y préparer. J’opte pour quelques runs sur les 1000m de D- et 20min sans répit qu’offrent les pentes de la Montagne de Lure (04).
J’avais fait pareil à l’essai du BMC Trailfox, en prévision de l’Enduro des Terres Noires, et sa longue spéciale du dimanche matin. Cette fois, les conditions sont arides. Le début de l’été bat son plein. Le terrain s’en ressent. Plus roulant, plus fuyant aussi.
Qu’importe ! Le chrono est sans appel : 50s plus rapide sur le Yeti SB5.5C. C’est indéniable, tant par les chiffres que par les sensations. Sur ce run qui a le chic pour tricoter entre les arbres, le vélo met particulièrement en confiance. Je suis conquérant comme rarement à son guidon. Sans retenue ou arrière pensée.
À tout instant, le vélo donne la sensation d’accélérer, parfois même de gicler de la courbe. Positionné sur l’arrière, au moment d’appuyer pour prendre le grip et l’appui, la suspension prend volontiers avant de se maintenir. Le vélo s’asseoit donc un peu, incite à tirer sur le cintre et, comme emporté par cette dynamique, je sortirais en manual à chaque fois, si je m’écoutais…
Même impression sur les mouvements de terrain. J’en (re)viens à pumper, tirer des bunny-up d’un dôme à l’autre, transférer d’un bord à l’opposé de la trace… Avaler certaines protubérances du tracé comme le ferait un pilote de BMX face au moindre pump en travers de son chemin (re)devient possible !
Un cran au dessus
Lure a beau culminer à 1800m d’altitude, il ne s’agit pas encore de la haute montagne. Au delà de la boutade en conclusion de la première partie de cet essai, il y a un véritable intérêt à replacer « le Yeti dans son élément. »
En l’occurence, les parcours de qualification et de course de la Megavalanche sont autrement plus éprouvants. Pour le vélo comme pour le bonhomme. Certains trous ont beau avoir été bouchés cette année, on ne dénature pas le dôme des Rousses ou le glacier de Sarenne. Les vitesses, les chocs, les compressions et les pentes rencontrées sont différents.
Pourtant, ici aussi, je construis une confiance sans faille au guidon du Yeti SB 5.5C. Les vitesses et les temps de réaction sont un ton au dessus. Qu’importe, il me suffit de la première demi-journée de ride pour trouver des repères, des sensations, de la vitesse, des envies. Décidément, le vélo tourne quoi qu’il arrive, garde la vitesse partout, ne se met jamais en travers, ne tape pas, ne glisse pas sans le vouloir…
En tricotant à la maison, le Yeti SB5.5C ne me paraissait pas grand. Mais là, il me parait d’une toute autre dimension. Avec la vitesse et les appuis décuplés, l’angle de direction, l’empattement et le stack ne m’ont jamais parus aussi à propos.
La semaine de la Mega ne fait que commencer mais déjà, j’ai la sensation que je n’ai plus que l’embarras du choix pour poser mes roues le jour de course. Petit à petit, les questions fusent au sujet du vélo. « Alors, cette Méga en 29 ? » Je n’avais pas plus réfléchir à la question avant qu’elle me soit posée. Mais à force, une réponse me vient presque par évidence : je n’ai jamais eu un vélo aussi adapté à cette course folle…
Au paroxisme
Au fil des jours, j’en viens à faire ce que je n’avais jamais aussi bien réussi en pareilles circonstances : trouver du relâchement et des moments de récupération au beau milieu de secteurs particulièrement exigeants. Ceux qui sont habitués du parcours des qualifications, sous le DMC, savent de quoi je parle 😉
La stabilité et la constance du grip sont tels qu’il devient possible de relâcher les épaules, le buste, les bras. Piloter des jambes pour laisser les bras au repos, l’espace de quelques courbes et secteurs défoncés. le Yeti SB5.5C s’inscrit et garde le cap d’une simple impulsion, sans jamais taper, désarçonner, saucissonner.
Une sensation salutaire en montagne, encore plus en compétition. La mass-start a de particulier qu’il n’y a pas le choix : il faut partir à fond, et calculer ensuite. Qu’il s’agisse de prendre rapidement les devants en qualification, ou de courir 3km dans la soupe d’un glacier particulièrement… mou !
Pour ma part, dans les deux cas, la fatigue est à son paroxysme dès le premier quart de la course. L’état de fatigue est manifeste. Je me connais : je sais que je n’ai pas fait de spécifique pour préparer la course !
Habituellement, j’ai tendance à lever le pied, baisser d’un ton pour rester dans une plage raisonnable, attendre un second souffle. Là, par deux fois, je me surprends à rester rapide et surtout, à tirer parti du relâchement que permet de Yeti SB5.5C.
Je prends des roues et suis des traces que je pensais laisser filer. Après coup, je pense même avoir découvert, sur le tard, une opportunité que j’aurais pu exploiter bien plus…
L’infini a t-il une limite ?
Il n’y a pas à dire, seule la course permet de pousser le matériel dans certains retranchements. L’intérêt ? Mieux cerner si finalement, en temps normal, le matériel est déjà proche de sa limite, ou au coeur de sa plage d’utilisation.
En la matière, le Yeti SB5.5C n’a pas à rougir. Mieux, il performe sans sourciller. Première fois en douze participations, que je ne passe pas la semaine de la Mega avec le sentiment qu’en quelques jours, le vélo ne prend pas des mois de vieillesse prématurément.
Je construis ce sentiment sur un ressenti bien réel. J’ai beau rouler vite, pousser fort, taper plus que de raison, rien ne bronche. Jamais je ne sens le vélo faire la saucisse sous mes sollicitations. Aussi folles, inopinées et exigeantes soient-elles.
Des pneus Michelin – carcasse reinforced – au grip : la chaîne de rigidité est parfaite, du moins très cohérente. Les pneus assis sur les jantes en 30mm, le rayonnage, les moyeux en Boost, le carbone du cadre, la liaison triangle avant/arrière, la potence massive, le cintre en 35mm… Difficile de sous peser l’influence de chacun. Le rendu global, lui, est infaillible. Tout tient la route.
Allez, si, il y a tout de même une limite, à la longue : la retransmission des chocs par le cintre en carbone. Ça fini forcément par faire mal aux mains. Je suis d’autant plus heureux de pouvoir trouver du relâchement pour récupérer de ce point de vue là.
Dans tous les cas, le montage n’est pas totalement irréprochable non plus. La Fox 36, le RaceFace Turbine et les Sram Guide RSC ont montrés leurs limites…
Des limites atteintes qui donnent une idée de ce que l’on peut surveiller à l’usage du Yeti SB5.5C X01… Plus que de véritables défauts puisque avant de participer à la Mega, je n’en avais même pas soupçonné l’existence. Et puis, on ne participe pas non plus à la Mega chaque semaine de l’année…
Les réglages de suspensions n’ont donc aucune exigence particulière. J’ai beau explorer quelques pistes pour tirer mieux de la Fox 36, la base initiale déterminée dans les tuyaux de cet essai reste la meilleure, et la plus simple. Tout juste suis-je tenté de tomber le SAG avant à 30% pour gagner un peu en sensibilité…
Réglages | Avant | Arrière |
---|---|---|
SAG | 30% (48mm) | 31% (18mm) |
Détente | -8/12 | -15/22 |
Compression (HV/BV) | 0 | 0 |
Token / Spacers | 1 (origine) | 1 (origine) |
Clics de détente et compression comptés depuis la position la plus vissée des molettes. SAG arrière réalisé assis/selle haute – SAG avant réalisé debout/bras en appui sur le cintre / épaule à l’aplomb du guidon.
La parenthèse All Mountain
Je n’ai pas non plus fait que la Megavalanche au guidon du Yeti SB5.5C. Je suis notamment allé chercher la fraîcheur sur les hauteurs de la Montagne de Lure. Ou bien encore pris un sacré plaisir à parcourir la liaison qui relie l’Alpe d’Huez au Téléphérique de Vaujany. Pas la piste d’exploitation, mais le joli sentier qui surplombe les lacs, on est d’accord..!
Dans les deux cas, des jolies traces qui ont le profil d’une virée all-mountain tant les coups de culs s’enchaînent. Mais aussi le terrain d’une virée en vélo de montagne tant les blocs, les pierres, les ornières et les racines de la basse végétation lacèrent le terrain.
Dans tous les cas, le Yeti SB5.5C est un régal. Tout autant dans son élément que quelques instants plus tard, au coeur d’un run de course. Bluffant ! La capacité de franchissement du 29 est au rendez-vous. La position relativement courte et haute incite à lever la tête, regarder loin devant, profiter du paysage.
Seul au pédalage, le Yeti SB5.5C montre une petite limite. Celle de devoir faire usage de la position la plus ferme du ProPedal pour annuler le phénomène de pompage de la suspension arrière. Un phénomène tout aussi présent à l’usage d’un plateau de 30 dents tel que le vélo est livré, ou un plateau de 36 dents, tel que j’en ai fait l’usage en compétition…
Mais alors, pourquoi diable ?!
Alors c’est bien beau, mais tous ces éléments ne me suffisent pas. Pourquoi diable, ce Yeti SB5.5C 29 pouces tourne-t-il si bien ?! Alors même qu’en matière de géométrie, il est, d’une part, très proche du BMC Trailfox, et d’autre part plus court en reach / plus haut en stack.
D’abord, en partie, parce que l’ergonomie du vélo renvoie plus vers l’arrière en courbe. Plus à l’aplomb de la roue qui subit le plus de pression au sol, et autour de laquelle on tourne davantage. À défaut d’avoir la place pour chercher le meilleur positionnement, le Yeti SB5.5C y amène naturellement par un reach court et un stack haut.
Ensuite, parce que la géométrie est une chose, que la dynamique du vélo en est une autre. À ce sujet, certains commentaires dans les tuyaux de cet essai s’avère très constructif. Plus précisément à propos de l’étude de la cinématique du Switch Infinity.
Je reste méfiant au sujet des analyses de « théoriciens » adeptes du logiciel Linkage. Notamment parce qu’ils ont tendance, comme ici, à étudier paramètre par paramètre, et se prononcer sur chaque valeur indépendamment. Alors que le rendu final, ce que l’on perçoit sur le terrain, est bien une savante combinaison de l’ensemble.
En l’occurence, Il y a de quoi dire au sujet du Yeti SB5.5C. À commencer par la phase qui précède le virage : le freinage. Effectivement, le vélo a tendance à ne pas y perdre son âme. Ça brasse un peu, mais surtout, l’assiette du vélo ne varie pas. Au moment de relâcher les freins et de tourner, le vélo n’a donc pas de mouvement parasite, de changement d’assiette, auquel il faudrait s’accommoder pour trouver ses marques.
Ensuite, Dans la propension qu’a la suspension à prendre le débattement. En aucune circonstance, elle n’y rechigne. Début ou fin de course, à l’attaque ou relâché, choc après choc. Ça ne tape jamais à l’impact. Logique, si l’on suppose que la courbe de ratio soit effectivement linéaire… Et que l’angle d’attaque des roues 29 sur l’obstacle participent au franchissement plutôt qu’au choc. En clair, qu’il ne faille pas décupler la force pour exploiter les centimètres de débattement suivants.
Pourtant, à l’usage, je persiste et signe : à aucun moment, même sur les pires sauts de marche imprévus de la Mega, porté par l’engouement, je n’ai eu la sensation de talonner. Par ailleurs, je n’ai jamais vraiment senti les prestations de la suspension faiblir au cours du temps. C’est d’ailleurs la fourche qui avait, à force, plus de mal à suivre.
Peut-être est-ce la trajectoire de la roue arrière qui entre en jeu ? Vers l’arrière en début de course, avant de revenir vers l’avant. Un comportement qui apporte de toute façon une impression de bonne sensibilité et d’absorption des chocs, avant de se raidir.
Peut-être est-ce aussi l’usage d’un réducteur de volume dans l’amortisseur ? J’ai relevé que le Yeti SB5.5C en utilise un, de taille intermédiaire.
Courbe de ratio linéaire, trajectoire de la roue arrière vers l’arrière en début de course, spacer à l’amortisseur pour ne pas talonner… Peut-être est-ce la bonne combinaison pour avoir la sensation d’une suspension progressive, sans pâtir des inconvénients d’une telle cinématique en seconde partie de course…
Peut-être est-ce aussi ce qui permet à ce 29 d’avoir la dynamique que je lui apprécie en courbe. À tel point que je ne trouve plus à ce Yeti les défauts que je ne pouvais prêter au format 29 pouces.
Je tiens là, en tout cas, une explication qui offre une cohérence certaine : liant différents paramètres du comportement de la suspension entre eux, et surtout, en tout point concordant avec mes ressentis, à l’usage.
En conclusion
Bref, au moment de conclure, le Yeti SB5.5C fait le plein d’arguments. La réponse à la traditionnelle question n’a pas d’égal… Pourquoi voudrais-je garder ce vélo ?
« Parce qu’à mon sens, il s’agit du meilleur vélo essayé jusqu’alors. Ses limites n’en sont pas vraiment. Il m’a fallu pinailler et rouler la pire course du monde, pour les approcher. Surtout, la dynamique du Yeti SB5.5C est hors-norme. Aussi facile à appréhender, qu’efficace et constante. J’ai beau me remémorer les Mondraker Dune, Devinci Troy et Canyon Spectral EX, très appréciés par ailleurs, Le Yeti SB5.5C est un ton au dessus. Tout bonnement le vélo le plus polyvalent qu’il m’ait été donné d’utiliser… Comment ai-je pu, à la longue, oublier que c’est un 29 » ?! Le Yeti SB5.5C défini un nouveau standard de prestation… Celui d’une nouvelle génération ?! Espérons-le ! Si l’on veut que rapidement, un tel rendu sois plus accessible… »
Positionnement & usage
En synthèse, le tableau de positionnement et d’usages permet, en un seul coup d’oeil, de saisir les capacités du vélo.
Comparées à celles des autres vélos à l’essai permettra de répondre à l’éternelle question > par rapport aux autres, qu’en penses-tu..? rendez-vous sur la page du Comparateur d’essais VTT Endurotribe pour en savoir plus > https://fullattack.cc/comparateur-essais-vtt-2016/