Jérôme Clementz et les frenchies au pays de la Guinness

Jérôme Clementz (Cannondale) nous raconte son expérience irlandaise lors de la première manche des Irish Gravity Enduro Series…

Texte & photos : Jérôme Clementz & Co

Une première

En France on a la chance, grâce à l’UCC et Tribe Sport Group, d’avoir des évènements All Mountain/Enduro depuis une décennie. En complément de cela s’est même développé une dizaine de circuits régionaux de qualité et des belles épreuves d’un jour. Depuis quelques années, nos voisins européens viennent nous rendre visite et commencent à s’organiser chez eux pour offrir des championnats d’Enduro à travers l’Europe. En 2012, l’Allemagne, le Royaume Uni, la Finlande, l’Espagne, l’Irlande, les USA et d’autres lancent leurs propres séries au niveau national : l’Enduro s’internationalise concrètement.

Niall Davis, rider irlandais, responsable de Biking.ie, est un acteur actif dans le paysage du VTT national irlandais puisqu’il propose déjà des séjours, des stages de pilotage, des formations et des épreuves de Cross-Country via sa société. Fin 2011 il décide de se mettre à l’Enduro et crée les Irish Gravity Enduro series, composées de 4 manches et d’un championnat national. Rapidement il va me contacter et gentiment m’inviter sur la première manche en Irlande.

Assez friand de voyage et de nouvelle découverte, j’accepte volontier son invitation et me voilà programmé un voyage en Irlande. J’en parle à mon frère, Pierre, qui est motivé également, principalement en raison de la Guinness, mais aussi pour ne pas me laisser seul dans un pays étranger. On book le voyage depuis Francfort et direction Dublin avec un vol direct. Sur place on retrouve Nicolas Lau et Manu Bonne qui ont également décidé de s’expatrier pour un week-end de ride.

Vendredi matin rendez-vous avec des riders locaux pour une découverte du parcours. Se joignent à nous Joe et hannah Barnes, Liam Moyniham , les fameux lurons des épisodes The Dudes of Hazzard. Le groupe s’élance donc à l’assault des trails, guidé par Peep le chien de berger qui ride à bloc. Au programme, 5 spéciales en sous-bois ressemblant fortement aux Vosges et visite touristique des points remarquables du parcours avec la magnifique cascade Powercourt.

On boucle le parcours qui s’avère un bon mix de trails naturels, de petits passages travaillés à la main, de sapinières, de forêts de feuillus, quelques rochers, dévers et racines. Tout ce qu’il faut pour faire du vrai VTT Enduro. En plus le dénivelé est bien utilisé et on a aussi le droit à quelques partis bien physiques sur le parcours qui vont faire mal lors de la course. Une boucle nous suffit, il faut garder des forces pour dimanche et on a aussi envie de faire un peu de tourisme.

Direction Dublin pour visiter la ville et pour ne PAS boire de bière dans un pub Irlandais. Nous sommes Vendredi Saint (Good Friday chez eux) et la vente d’alcool est interdite partout. Qu’à cela ne tienne, nous nous rattrapons sur un buffet à volonté « all you can eat » avant de rejoindre nos quartiers.

Samedi on se refait une boucle sur le parcours entre « Français » ou plutôt Alsaciens devrais-je dire. La météo est toujours clémente, le parcours est encore mieux après le passage de quelques riders et on prend vraiment du plaisir. Cependant on se rend également compte que la journée du dimanche sera longue et que les 30 km du parcours vont laisser des traces.

Beaucoup d’irlandais découvre la discipline et on voit toute sorte de rider avec toute sorte d’équipement. Du maillot de foot, du vélo de Cross-Country avec les bars-end, des enduristes équipés, des jeunes, des moins jeunes, des descendeurs avec des vélos à 20kg et j’en passe… L’essentiel là-dedans c’est que tout le monde a le sourire et semble se régaler sur le parcours et se montre motivé pour la course du dimanche.

Mode Race

300 inscrits sont au départ et chacun gère son timing comme il le veut, seules conditions : finir avant la nuit et faire les spéciales dans l’ordre. Des balises sont situés au départ et à l’arrivée et on doit biper notre bracelet cellule nous-même. Pas le mode de chrono le plus précis, particulièrement quand tu perds 3 secondes à l’arrivée pour biper après avoir été à la recherche de dixième sur la parcours. Mais c’est le même tarif pour tous et cela permet vraiment un déroulement fluide et convivial, une bonne solution qu’on devrait voir par chez nous rapidement.

Le niveau est plutôt relevé avec le Team France (Manu Bonne, Nicolas Lau, Clementz Pierre et moi), les Ecossais (Barnes et Moyniham, Forrest), les Anglais (Alex Stock, Harry Heath) et les locaux (Seymour, Callaghan et Davis). Le temps est sec mais il s’annonce la pluie en milieu de journée, du coup les top-pilotes font la course en tête et enchaînent les spéciales en espérant finir sur le sec. On va bientôt avoir besoin d’un météorologue dans les teams d’Enduro…

La 1ère spéciale, met de suite dans le bain avec quelques relances qui brûlent et surtout des virages qui s’enchaînent rapidement. La seconde se révèle plus physique avec 3 bosses successifs suivies de parties assez rapides. La 3ème qui commence par une partie plutôt plate où il faut conserver de la vitesse en jouant avec le terrain, avant de plonger vers l’arrivée à toute vitesse. Chacun partant quand il veut, il n’est pas possible de se situer dans le classement et on doit se fier à nos sensations. De mon côté ça tourne plutôt pas mal et au final les spéciales passent mieux que prévu au niveau physique et le plaisir de piloter est au rendez-vous.

En allant sur la 4ème spéciale, on rencontre le lapin de pâques venu nous supporter et peu après on arrive au ravito. Thé chaud, Red Bull, fruits, barres de céréales, sandwichs, le tout avec du bon son assuré par Red Bull et sa voiture sono. Les choses ne sont pas faites à moitié et l’ambiance est carrément bonne. Après un petit break nous repartons pour la 4ème spéciale dans la sapinière au début puis au bord du ruisseau en devers pour finir, c’est la plus longue du jour avec prêt de 4 minutes 30 au final.

La dernière liaison est elle aussi la plus longue mais on sait également que la dernière spéciale est la plus fun. On commence par un pumptrack naturel en sous-bois, pour sortir sur un passage dégagé dans un coupe forestière à blanc avant de plonger dans les épineux et la pente tout en glisse. Plutôt que de rejoindre l’arrivée directement et vu que la pluie n’est pas d’actualité, on retourne au ravitaillement profiter de l’ambiance, rencontrer les autres riders et s’amuser avec notre ami le lapin.

En rendant notre transpondeur on reçoit directement nos temps de spéciales et le temps total. On peut donc comparer avec nos collègues de ride sans pour autant connaitre le résultat final et garder du suspens pour le podium. Une fois tout le monde arrivés, la remise des prix se déroule dans une ambiance de folie avec un speaker pas tout à fait traditionnel qui met le feu au public et qui nous fera descendre du podium en Slam comme lors de concert de rock.

Du côté du « Team France », Manu Bonne remporte la catégorie Amateur, Pierre Clementz termine à une belle 9ème place chez les Pros. Nicolas Lau termine ex-aequo avec Robin Seymour, champion irlandais de Cross-Country ayant déjà 3 participations aux JO et monte sur la 3ème marche grâce à un meilleur chrono sur le SP5. Quant à moi je termine 2ème sans avoir fait de grosse faute, en ayant plutôt bien roulé, les sensations étaient bonnes et le résultat plus que satisfaisant. J’ai dû m’incliner pour 3 secondes face à un Joe Barnes en excellente forme qui remporte l’épreuve avec brio.

Comme dit au début, les épreuves s’internationalisent, les ambitions des enduristes étrangers et leurs préparations elles aussi s’intensifient. Ce qui devrait nous donner de belles courses dans le futur où la France ne sera peut-être plus autant dominatrice. Pour conclure le weekend-end et renforcer cette impression d’avoir participé à un super évènement, une belle soirée avait lieu dans un bar en bord de mer. Autant vous dire qu’on a dignement représenté notre pays et qu’on en a profité pour rencontrer les locaux qui avaient tous l’air d’avoir apprécié le travail de l’organisation et attendent déjà avec l’impatience la prochaine manche en Juin.

Pour une première organisation, on peut parler de franche réussite, Niall Davis (8ème de la course) semble avoir réuni tous les ingrédients pour le succès de la discipline en Irlande et risque de voir de nombreux locaux se convertir à l’Enduro. Nous avons réellement apprécié notre séjour même si avec des bars fermés et un terrain sec, nous n’avons pas eu droit à la VRAI Irlande.

Un grand merci à Niall Davis et son équipe pour l’organisation et l’invitation, à Victor et Gordon Lucas pour leur accueil, à Garry Hamilton et Peep le chien pour le ride, aux locaux pour leur sympathie et à tous nos partenaires.